Jean François Edmond GUYOT DESSAIGNE
Si, de mon temps, ma terre ne fût désignée par mon nom, qui se souviendrait encore de Cumilius? L’oubli est le plus souvent le sort réservé à ceux qui ont pourtant présidé à des évolutions importantes. Nous avons la mémoire courte. L’histoire invite à la modestie.
Ainsi, de 1882 à 1907, Jean François Edmond GUYOT DESSAIGNE fait entrer Cunlhat dans la République et la modernité. En cette fin de 19ème siècle, il lui faut affirmer la primauté de la République face à un clergé âpre à conserver et étendre ses prérogatives et une armée où les tentations royalistes et bonapartistes sont encore vives. Considérant que la laïcité est le terreau de la République, ses efforts de premier magistrat de la commune portent immédiatement sur l’éducation. Avant même les lois de Jules FERRY, il institue à Cunlhat l’enseignement public et laïc. C’est à lui que l’on doit la construction de l’école publique des filles, actuelle école maternelle.
Elu conseiller général en 1882, il devient président de l’assemblée départementale en 1901 où il s’affirme là encore défenseur de la laïcité. C’est ainsi qu’en 1906, lors du renouvellement favorable aux radicaux, il déclare : « Le peuple a compris sans peine que la persécution religieuse, dont on lui montrait la menace suspendue sur sa tête, n’existait que dans l’imagination de ceux qui confondent trop aisément ou feignent de confondre la religion avec la richesse et la puissance des congrégations. »
Devenu ministre de la justice dans le gouvernement Clémenceau, il met en œuvre la loi de séparation des Eglises et de l’Etat, notamment en supprimant toute mention à Dieu dans les serments juridictionnels, ce qui lui vaut les foudres de la presse conservatrice.
Parallèlement, à Cunlhat et dans le Puy de Dôme, il œuvre pour que le progrès technique contribue à faire progresser les conditions de vie des habitants. C’est à lui que les Cunlhatois doivent les premiers réseaux de distribution d’eau potable, l’arrivée de l’électricité dans les rues du bourg, le tracé de nombreuses routes, le marché couvert, l’école des filles mais aussi l’ouverture de la première bibliothèque municipale populaire.
Enfin, je ne saurais terminer cette évocation sans faire mention de son action de Garde des Sceaux. A ce titre, il est le premier à déposer devant l’Assemblée nationale un projet de loi portant abolition de la peine de mort. Ainsi, derrière le personnage public, au caractère bourru et sans doute peu conciliant qui lui valut le surnom de « vieux sanglier », c’est avant tout un humaniste qui pendant plus de 25 ans occupe le siège de maire. Il peut paraître surprenant que les Cunlhatois n’aient que peu conservé la mémoire de cet homme auquel, lors de son inhumation en janvier 1908, le gouvernement de la République rend des hommages éclatants. Mais finalement, ce qui importe, ce n’est pas son nom, c’est qu’il ait tenu son rôle, préoccupé d’œuvrer pour l’intérêt général.
L’histoire, décidément, invite à la modestie.
Bibliographie
Article paru dans la Gazette de la Halle n°1 – Danielle Fournioux
Pour en savoir plus vous pouvez télécharger l’article plus détaillé paru dans le bulle tin annuel du GRAHLF de 1994: Guyot-Dessaignes, Maire et Ministre.