Le Bois des Drôles

Fin des années 90, derrière les tennis, dans un bois de résineux, ont émergé pendant plusieurs années, de drôles de cabanes. Ingénieuses, de bric ou de broc, techniques, poétiques, elles étaient l’œuvre d’enfants, d’artistes, d’amateurs ou de professionnels du bois qui, le temps d’une saison, offraient aux visiteurs ces abris éphémères.

Le  travail commençait vers la mi-mai ; chacun choisissait son emplacement et laissait parler son imagination avant de jouer de la scie, du marteau, de la vrille, du rabot.

Un dimanche de début d’été, la fête envahissait le bois. Musiques, danses, chants, mimes, piécettes ponctuaient ces journées qui attiraient des curieux, venus de partout. Des prix étaient décernés mais finalement, tous étaient gagnants.

Le bois sans nom derrière, derrière les tennis, était ainsi devenu le Bois des Drôles.

Drôle car gaie comme la fête, drôle car surprenant comme ces cabanes aux formes incongrues, drôle comme les « drôles », ces gosses espiègles de tous âges qui, pendant plusieurs années, avaient mélangé leurs rêves.

A l’époque quelques savants fous rêvaient de poursuivre le voyage jusque sur la Lune forestière, satellite naturel de la planète géante gazeuse Endor située dans un système stellaire double de la Bordure extérieure de la Galaxie. La Lune d’Endor recouverte d’une forêt tempérée aurait abrité plusieurs espèces intelligentes autochtones mais aussi des traces de civilisations lointaines très lointaines. Le Bois des Drôles devait s’étendre sur cette Lune, peut-être jusqu’à Toutée dans des parcours de découvertes extraordinaires et extraterrestres.

La dernière fête du Bois des Drôles a eu lieu en 2001, année d’élection municipale qui a effacé ce rendez-vous d’un art qui ne disait pas son nom, d’un art ni classique, ni contemporain, certainement pas académique, d’un art dont le plus grand succès était la complicité et le bonheur partagés.

Aujourd’hui, les résineux ont été coupés, des feuillus ont été plantés. Les Drôles reviendront-ils un jour enchanter cette forêt qui a perdu son nom ? Marcherons-nous un jour sur la Lune forestière ?

Ci-dessous, images réalisées en 2001 par Jean-Luc MONTEIX